Villes et villages ruraux en quête d’ingénierie
«L’ingénierie, c’est transformer les besoins en actions et c’est aussi permettre aux maires ruraux d’être imaginatifs.» L’observation vient d’Edmond Jorda, maire de Sainte-Marie-La-Mer (4.749 habitants, Pyrénées-Orientales), lors d’un débat consacré à l’ingénierie des territoires ruraux dans le cadre du dernier congrès de l’AMF. Aujourd’hui, malgré l’existence de dispositifs comme Petites villes de demain (moins de 20.000 habitants) ou Villages d’avenir (moins de 3.500 habitants) lancés par l’intermédiaire de l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT), l’ingénierie, qu’elle soit technique ou financière, reste un véritable enjeu pour les communes et les intercommunalités rurales.
UN PANEL D’AIDES EN MATIÈRE D’INGÉNIERIE
L’Association des maires ruraux de France (AMRF), qui a porté Villages d’avenir, pose un regard assez positif sur ce dispositif, bien qu’il ne concerne à ce jour que 2.900 communes sur les 4.000 candidatures déposées, pour un potentiel de 32.000 communes de moins de 3.500 habitants. «Cela va dans le bon sens. Un chef de projet, basé en sous-préfecture, intervient dans chaque département, et impulse une mécanique d’accompagnement en allant à la rencontre des maires avec qui il étudie les projets. Cela a permis d’accélérer les réalisations mais aussi de mettre en oeuvre une meilleure coordination avec le sous-préfet à la ruralité dans chaque département», constate Cédric Szabo, directeur de l’AMRF. Les projets soutenus par Villages d’avenir concernent la rénovation des bâtiments publics et du patrimoine, l’aménagement des espaces publics, les commerces de proximité, l’offre de mobilités douces, les lieux de vie partagés, les locaux associatifs, les équipements mais aussi le logement. «Dans nos territoires, nous avons besoin de logements mais il n’y a pas d’investisseurs, pas de promoteurs ni de bailleurs sociaux prêts à porter des opérations. Il existe pourtant tout un panel d’aides en matière d’ingénierie. Au-delà du soutien technique, nous avons aussi besoin d’un accompagnement financier», énumère Cécile Gallien, maire de Vorey-sur-Arzon (1.466 habitants, Haute-Loire). En première ligne de l’ingénierie, l’ANCT — au-delà des dispositifs déjà cités — développe un programme «sur mesure» pour les communes de moins de 3.500 habitants. Le Cerema a de son côté recruté 20 directeurs de projets en soutien aux chefs de projets de Villages d’avenir. «Avec deux tiers des 35.000 communes exposées à un risque naturel, le Cerema fournit des études sur l’analyse des sols, les enjeux liés à l’eau, l’état des infrastructures… C’est une approche systémique globale qui est ainsi apportée», précise Marie-Claude Jarrot, sa présidente.
CERTAINES COMMUNES SE REGROUPENT
Au-delà d’une coopération de plus en plus forte avec les sous-préfectures, les collectivités rurales peuvent aussi bénéficier des moyens de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), du soutien des agences techniques départementales ou encore des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE). Certains CAUE sont touefois menacés. «Cela nous inquiète, car ils nous ont aidés à concrétiser nos projets», note Rose-Marie Falque maire de Azerailles (770 habitants, Meurthe-et-Moselle). Et le besoin est réel: pour répondre aux appels à projets, les collectivités doivent solliciter des bureaux d’études. «Il y a un réel choc de cultures! S’ils apportent leur professionnalisme et leur expérience, nous sommes les garants de la réalité de nos territoires, qu’ils ne connaissent pas toujours», déplore Gérard Fillon, maire de Beurey-sur-Saulx (418 habitants, Meuse).
Si certaines collectivités essaient d’intégrer le maximum de dispositifs initiés par l’État (territoires pilotes du ZAN, Petites villes de demain, Villages d’avenir…) d’autres s’organisent en interne pour que des projets puissent aboutir. Des communes voisines se regroupent et se font aider pour gérer ensemble un équipement ou avancer sur une question plus transversale comme le tourisme. Constatant que 60% des subventions étaient captées par les communes les plus riches, les élus de Perpignan Méditerranée métropole (Pyrénées-Orientales) ont de leur côté doté de 120.000€ un fonds d’aides pour les communes de moins de 1.500 habitants. «Nous avons sollicité l’agence d’urbanisme catalane pour mener un appel à projet. Quinze communes ont ainsi pu bénéficier de financements pour des études de faisabilité technique et budgétaire. Et des projets ont pu voir le jour», se réjouit Edmond Jorda.
En achetant le numéro correspondant à cet article (Numéro 4), vous recevrez la version imprimée et aurez accès immédiatement à l'ensemble de son contenu en ligne.
Je m'abonne (11 numéros) / J'achète ce numéro Je me connecte

